Interview de Marie Chartres, auteure de Comme un feu furieux


L'école des loisirs continue de découvrir de nouveaux talents... Marie Chartres en fait partie. Découverte en 2009 avec Bleu de Rose, elle a publié 4 romans chez L'école des loisirs dont l'incroyable Comme un feu furieux (ma chronique >>>). Pour La Voix du Livre, elle a accepté de répondre à quelques questions revenant sur ce livre.




Pouvez-vous présenter Comme un feu furieux en quelques mots ?

Ce sont quelques jours dans la vie d’une adolescente qui a la particularité de vivre à Tiksi, ville au nord de la Sibérie. Il y a là, l’hiver polaire, la nuit constante, le froid, les secrets enfouis sous la neige, le désir de lumière et d’aventure.

D’où vous est venue l’inspiration pour cette histoire ?

Je suis partie d’un reportage photographique d’Evgenia Arbugaeva  qui mettait en scène la ville de Tiksi. On y voyait la neige, partout, immense, totale et cependant, quelques taches de couleurs : les vêtements des enfants qui s’amusent malgré tout dans cette ville désolée, presque abandonnée. J’avais trouvé le cadre de mon histoire, chose très nouvelle pour moi puisque auparavant, je ne situais jamais géographiquement mes histoires, je restais volontairement dans le flou. Ici, grâce à ce territoire, j’ai découvert une autre façon d’écrire, une autre manière de travailler mes personnages, leurs psychologies. J’ai eu l’impression d’explorer un nouveau champ romanesque.

Vous touchez à une très belle réflexion sur le deuil : pensez-vous que tout deuil se fait en partant ?

J’ai l’impression que oui. Le travail se fait dans l’éloignement, la coupure, la rupture ou encore la suspension. On cherche un autre air, une autre lumière, de nouvelles couleurs. On cherche une deuxième naissance, que tout soit nouveau devant les yeux. Alors on avance sans oublier de se retourner, de penser, d’analyser. On  compose avec sa première et deuxième vie. On cohabite.

La reconstruction de soi est tout aussi importante dans le livre que les tentatives de reconstruction des autres : pensez-vous qu’on ne peut se construire et se reconstruire que par les autres ?

Oui, je crois toujours qu’il existe des fils invisibles entre les êtres et que ceux-là, ceux qui se reconstruisent forment une communauté silencieuse et invisible qui s’entraident et s’élèvent.

La famille tient une place très importante dans ce livre. Pourquoi ?

J’aime beaucoup, à travers mes livres, travailler le motif de la famille, de la fratrie. Parce qu’on touche quelque chose d’incroyablement universel et intime à la fois. Tout à la fois est unique et commun.

Qu’est-ce qu’un rêve, selon vous ?

C’est l’endormissement et le réveil, c’est la conscience et l’illusion. C’est l’échappatoire puis le retour au réel. C’est le voyage, c’est l’avancée. C’est un grand pouvoir, une grande force. C’est une croyance.
Pouvez-vous nous parler du symbole de la lumière, qui parcourt votre œuvre ?
C’est effectivement le grand thème du livre. C’était important pour moi d’évoquer ce noir constant et ces secrets que l’on ne dit pas, que l’on ne nomme pas. Je pouvais ainsi travailler les métaphores, l’opposition jour/nuit, enfouissement, révélation. J’ai également pensé que ce symbole participait à la poésie que je voulais injecter dans le roman.
Pourquoi avoir destiné ce roman à la jeunesse ?
Parce que mon héroïne a quinze ans et que c’est le haut lieu de la sensibilité et du tremblement, des notions qui me sont très chères.
Pourquoi L’école des loisirs ?
J’ai grandi avec cette maison d’édition. Petite, j’allais à la bibliothèque toutes les semaines pour emprunter des livres. Au départ, je n’étais intéressée que par les recueils de contes. Puis j’ai découvert tout ce que proposait l’Ecole des Loisirs, à travers Marie Aude Murail, Judy Blume, Sophie Tasma et ce fut une révélation. L’Ecole des Loisirs, c’est d’abord pour moi un parcours de lectrice, ça l’est toujours. J’y ai appris beaucoup, en particulier la beauté d’une écriture destinée à la jeunesse. Ensuite, ce que je lisais m’a aidé à objectiver certaines expériences de vie. J’ai gagné de la force et de la sensibilité grâce à cette maison.
Quels sont vos projets ?
En début d’année prochaine sortira Les petits Orages , toujours à l’EDL dans la collection Médium. Cette fois-ci, on ira aux Etats-Unis dans le Dakota du Sud et on suivra l’amitié entre deux adolescents très différents. J’aborde le thème de la reconstruction
Pour finir, quel effet cela fait-il d’être publié l’année des 50 ans de L’école des loisirs ?
C’est joyeux, excitant, bouleversant ! Je suis très fière.

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